Les deux journées qui suivirent le passage du camion insoumis à Nîmes furent aussi douces que graves. Bien avant de pouvoir goûter à la belle vie qu’offre le port de Martigues, l’équipe du camion sur les routes depuis deux semaines dut faire face à sa première avarie. Mais comme vous le savez déjà, rien, pas même un maire récalcitrant ou un problème technique, n’empêchera un.e insoumis.e d’être à l’écoute des citoyen.ne.s et de réinstaller le débat dans l’espace public.
Alors vaille que vaille, après un bon café prit les pieds dans l’eau au port de Martigues, l’équipe du camion est allée à la rencontre des ouvrier.e.s de l’industrie pétro-chimique de la région. Car si le centre-ville donne à voir une petite Venise avec sa succession de ponts, c’est une toute autre réalité qui entoure la ville. A priori, l’ambiance est bonne sous les pins qui recouvrent la place où les ouvriers se réunissent tous les jours pour se restaurer et se détendre boule de pétanque à la main. Cependant, pour beaucoup les cœurs sont gros tant ils sont nombreux à vivre la précarité entraînée par la multiplication du recours à l’intérim dans ce secteur. Sur la place, 50 à 60 % des ouvriers sont des travailleur.se.s détaché.e.s. Et même si tous partagent avec plaisir leurs repas et ce moment de détente, leurs collègues non détaché.e.s regrettent que leurs employeurs se servent d’eux pour tirer à la baisse leurs salaires ainsi que les conditions sanitaires et écologiques d’exercice de cette activité dangereuse.
Renforcée par cette expérience dans sa volonté de renégocier les traités européens [qui permettent entre autre le dumping social sur notre territoire], l’équipe du camion s’est ensuite installée sur le parking du Auchan de Martigues connu pour avoir fait taire toutes revendications salariales en son sein. Elle dut alors faire preuve de pédagogie pour faire comprendre aux martigaux et martigales très attaché.e.s à l’idéal européen, que contrairement à ce que laisse entendre Benoît Hamon, nous ne souhaitions pas envers et contre tout sortir de l’Union Européenne, mais bien se servir du poids économique et politique de la France pour désobéir puis renégocier les traités actuels qui asservissent les peuples de l’ensemble du continent.
À 18 h, après la présentation générale du programme de la France Insoumise et un point précis sur notre projet de planification écologique fait par Hendrik Davi sur la Place des Martyrs devant 80 citoyens, l’agora populaire organisée par les insoumis.es prit une tournure tout à fait inattendue. Alors qu’auparavant les citoyen.ne.s posaient des questions à l’équipe pour avoir des renseignements sur le programme, cette fois ci les insoumis.es et les moins insoumis.es de tous les milieux socio-professionnels, (infirmier.es, ouvrier.es, travailleur.se.s du secteur touristique, mères contraintes au chômage par le manque de places en crèche, apprenties en chaudronnerie, citoyen.ne.s soucieux de l’environnement etc…) se sont succédés aux micros pour expliquer avec une précision inattendue comment point par point l’application du programme de la France insoumise transformerait leurs vies.
Cette réappropriation populaire du programme, montre bien que quelque chose se passe. Tous ces citoyens ont compris que vouloir vivre une vie conventionnelle nécessite aujourd’hui un minimum de radicalité. La journée passée à Aubagne le lendemain, en est d’ailleurs un bel exemple. Car si la frilosité de la mairie à accueillir le camion sur la place Foch, nous a obligé à bloquer successivement un carrefour et la sortie d’un marché afin de pouvoir organiser notre agora populaire, l’accueil positif des automobilistes, des maraîchers et de la police municipale nous encourage grandement à persévérer dans cette voie.
Florian Yagoubi